Deux décisions de la CEDH démontrent une nouvelle fois que le recours illégitime à la force et la manière complaisante dont certains juges belges le traitent parfois est un problème récurrent en Belgique.
Le 20 juillet dernier, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rendu deux décisions de règlement amiable impliquant des citoyens belges. De quoi s’agissait-il ? Après de longues années de procédure, l’Etat belge a fini par reconnaître que les deux personnes concernées par ces deux procédures distinctes (et sans aucun rapport entre elles) avaient fait l’objet de violences policières constituant des traitements inhumains et dégradants contraires à la CEDH. Cela, alors que les juridictions belges avaient ignoré leurs plaintes, pourtant bien étayées. L’Etat belge, après de longues années de déni, a préféré payer une somme importante aux intéressés pour s’épargner une nouvelle condamnation internationale et l’opprobre qu’aurait générée des décisions gênantes de la Cour.
Car, en effet, il ne s’agit pas là de la première affaire dans laquelle le recours illégitime à la force et l’impunité policière sont pointées du doigt par la juridiction européenne. Dans son célèbre arrêt Bouyid c. Belgique, la Grande Chambre de la CEDH taclait singulièrement les autorités belges, condamnant des interventions policières qui avaient pourtant été jugées parfaitement légitimes par les juges belges, y compris de la Cour de cassation.
L’Etat belge ne semble pas avoir tout à fait retenu la leçon. Il en sera donc pour ses (nos) frais. Sur le plan financier tout d’abord : après avoir négligé les plaintes des victimes pendant les longues années de procédures en Belgique, elle déboursera respectivement 18 500 et 15 000 euros pour indemniser les victimes. Et en matière de crédibilité internationale surtout, ces affaires placent la Belgique sous la lumière peu glorieuse des pays qui tolèrent l’impunité s’ils ne sont pas contraints d’admettre le contraire par une instance internationale.
La LDH est intervenue dans l’une de ces affaires dans l’objectif d’informer la Cour des difficultés rencontrées par les victimes de violences policières pour faire valoir leurs droits devant la justice du Royaume. A cette occasion, la LDH a rédigé un amicus curiae visant à éclairer la Cour sur ce phénomène et sur les principaux obstacles réglementaires et pratiques que rencontrent les victimes de ces violences. Une version synthétique de l’amicus curiae est également disponible.
En conclusion, cette affaire démontre que le recours illégitime à la force (à caractère raciste dans l’un des deux cas) et la manière complaisante dont certains juges belges le traitent parfois est un problème récurrent en Belgique. Il est temps que l’Etat fédéral mette fin à l’impunité de celles et ceux qui nuisent à l’institution policière en prenant des mesures concrètes, tant réglementaires que par la formation des forces de police et des magistrat.e.s.
Plus d’infos sur la page de la campagne Quels droits face à la police?
7 septembre 2017